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jeudi 18 mai 2017

Critique #21 - Get Out [AVEC SPOILERS]



Note : 4,9/5
Salut la Ciné-News Communauty ! Cette nouvelle critique marque le grand retour de Ciné-News après une petite période d’inactivité.
« Ce n’est pas parce que vous êtes invité, que vous êtes le bienvenu ». Non, il ne s’agit pas du nouveau slogan de Marine Le Pen mais celui du film Get Out, dont vous avez certainement entendu parler. Ce thriller horrifique américain écrit, coproduit et réalisé par Jordan Peele a fait l’effet d’une bombe ces dernières semaines. A tort ou à raison, ce film est victime d’un succès incroyable. Souvent, les films ayant un énorme succès sont surcotés et j’avais peur que ce soit le cas ici. Je vous rassure, Get Out mérite amplement sa réussite. Comme cela est indiqué dans le titre, l’article comportera quelques spoilers.

« Couple mixte, Chris et sa petite amie Rose  filent le parfait amour. Le moment est donc venu de rencontrer la belle famille, Missy et Dean lors d’un week-end sur leur domaine dans le nord de l’État. Chris commence par penser que l’atmosphère tendue est liée à leur différence de couleur de peau, mais très vite une série d’incidents de plus en plus inquiétants lui permet de découvrir l’inimaginable. »




Je préfère vous prévenir tout de suite, je ne suis pas un fervent admirateur de films d’horreur. Mais j’ai été vraiment attiré par celui-ci de par l’histoire qui s’en dégage. Le but n’est pas de faire peur pour faire peur. L’angoisse a une place qui lui est légitime. Le métrage a besoin de ce registre. Le côté horreur n’a pas été ajouté pour le plaisir, il est nécessaire.
Après avoir visionné Get Out, ce qui m’a immédiatement interpellé (même si la bande-annonce présageait cela) c’est qu’il s’agit là du premier film d’horreur ayant pour thème le racisme. Je n’ai pas vu beaucoup de film du genre mais j’ai beau réfléchir, il ne me semble pas avoir entendu parler de film horrifique centré sur le racisme avant la sortie de celui-ci.
Je reviendrai dessus plus tard, mais il n’est pas uniquement question de racisme dans ce long-métrage. C’est plus complexe que ça.

Ce thriller joue avec les codes du film d’horreur tout en les revisitant, en les réactualisant. Cela permet à cette production américaine de briser les stéréotypes. Tenez, un exemple tout bête : dans la plupart des films d’horreur, le black meurt dès le début. Ce n’est pas le cas ici. Un autre sort est réservé aux noirs dans l’intrigue.
Autre exemple, dans les films du genre, l’arrivée des flics à la fin a pour but de rassurer le spectateur. Eh bien je vous jure – et je ne vous mens pas – qu’ici, l’arrivée de la voiture de flic à la fin nous fait flipper. Après tout ce que le héros a traversé, on voit cette voiture arriver et on s’attend au pire… Pourquoi l’arrivée des flics ne nous rassure pas ? À cause de l’ambiance installée depuis le début du long-métrage dans laquelle les blancs sont vraiment "bizarres".  D’autre part, Get Out possède beaucoup de références à l’époque de l’esclavagisme (la scène la plus marquante est celle du Bingo), de manière subtile et choquante à la fois. Du coup, avec tout ce qui s’est déroulé aux Etats-Unis ces dernières années, notamment avec les policiers qui ont tirés sur des noirs sans raisons, on s’attend justement à une référence du genre à la fin avec l’arrivée de cette fameuse voiture.

Regarder Get Out vous demande 100% de votre attention. Les moindres détails sont importants, même ceux qui nous paraissent anodins. C’est pourquoi je pense que ce film doit être au moins visionné deux fois afin de faire attention à tout ce qui est dit. De ce côté-là donc, les répliques sont absolument bien écrites. Les dialoguistes ont fait un boulot qui frôle l’excellence.

Les acteurs tient, parlons-en ! Ils sont tous géniaux !!! Franchement, c’est un sans-faute. Mention spéciale pour l’interprète de Chris – Daniel Kaluuya –  qui joue également le personnage principal du deuxième épisode de la première saison de Black Mirror – où je l’avais déjà trouvé excellent. Cet acteur est très expressif, il parvient à nous faire ressentir le malaise que ressent son personnage. Personnellement, j’ai beau être blanc, tout au long du film j’ai été aussi mal à l’aise que lui – entouré de gens appartenant à une classe sociale qui ne nous appartient pas. Je reste donc convaincu que l’un des objectifs de Get Out est la prise de conscience à travers la mise en situation. Je pense que ça nous est tous arrivé d’être avec un ami black et de lui faire des réflexions concernant sa couleur de peau, juste pour plaisanter. Si lui ne le montre pas forcément, cette remarque peut le toucher, mais nous ne le saurions pas. Dans cette fiction, on comprend qu’une simple remarque peut faire du mal en ressentant la contrariété de Chris. Bon, dans le film les réflexions qui sont faites à son égard ont un but précis ; on est dans un contexte bien particulier mais qu’importe, le ressenti reste le même.

Le travail opéré sur le communautarisme est la plus grosse réussite du film. Chris doute sur la famille de Rose, et à sa place il en serait de même pour nous. Mais si vous regardez bien, concernant les noirs il n’a pas tellement de craintes – du moins, au début. Je pense par exemple à la première soirée qu’il passe chez les parents de Rose lorsqu’il sort dehors pour fumer une cigarette. Soudainement, il voit le jardinier courir à toute vitesse vers lui (NDLR : l'image à droite). Sur le coup, Chris est surpris mais pas plus que ça. A cet instant il doit se dire « il est noir, donc je ne crains rien ». Vous comme moi savez qu’il ne faut pas se fier aux apparences… Surtout dans cette production américaine. Idem durant la petite fête organisée, quand Chris se sent rassuré par la simple présence d’un autre homme de couleur. Ce n’est qu’auprès d’eux que le protagoniste principal se sent (presque) à l’aise. Le communautaire à une place vraiment importante au sein de l’intrigue, et c’est assurément bien travaillé.

Sur l’aspect technique, j’ai été épaté par les plans qui sont maîtrisés, originaux et angoissants. Si si, je vous assure. Au moment où j’écris ces lignes, le plan qui me vient immédiatement en tête est celui où Chris et sa copine – Rose Armitage – arrivent chez les parents de cette dernière. Quand Chris rencontre les parents de sa copine devant la maison, la caméra est assez proche d’eux au départ, puis au fur et à mesure elle recule. Nous observons donc cette scène de loin. La caméra s’arrête de reculer au moment où le jardinier – qui lui aussi est noir – apparaît dans le plan. Le jardinier observe d’ailleurs les salutations entre les protagonistes. Je crois que ce plan m’a vraiment marqué parce que l’on sent dès lors que quelque chose ne va pas. Ce n’est pas anodin comme façon de tourner. En général quand nous voyons des gens faire connaissance, la caméra est proche d’eux, pour que le spectateur se sente proche lui aussi alors qu’ici c’est l’inverse. Et c’est assez flippant je dois dire.


Au début le film joue beaucoup sur les jumpscare pour faire sursauter le spectateur, mais au fur et à mesure, l’angoisse prend le dessus. La musique s’appuie beaucoup sur l’horreur. Elle m’a clairement foutu le trac, je vous promets. Les musiques sont très belles, rien à dire dessus. Mais elles sont très stressantes. Elle nous plonge totalement dans l’ambiance voulue par le réalisateur. En cela, la mission est divinement réussie.  Du coup, Get Out est plutôt oppressant comme film. On sait que quelque chose ne tourne pas rond dans cette famille, mais nous ne savons pas quoi. En fait, on vit l’intrigue à travers les yeux de Chris. On est aussi inquiet que lui, et c’est sans doute pour cela que nous nous identifions à ce personnage.
J’ai beaucoup apprécié l’évolution du protagoniste principal. Effectivement, il y a un énorme contraste entre le héros du début qui ne cherche pas à faire d’histoire et le Chris violent de la fin.

Je m’attendais à un film qui faisait vraiment peur, voire même traumatisant, à l’instar des franchises telles que Insidious, Saw ou encore Conjuring, mais Get Out se différencie du genre. L’angoisse et l’horreur sont liés au racisme ainsi qu’à la famille Armitage et leurs mystères. L'angoisse a une visée dénonciatrice, histoire de nous faire ouvrir les yeux. C’est compliqué à expliquer, mais ce qu’il faut retenir c’est que ce n’est pas de l’horreur comme vous avez l’habitude d'en voir. Ce film renoue avec le style même du genre. De toute façon, vous n’êtes pas sans savoir que le genre en lui-même comporte des sous-genres et qu’il existe différents styles d’horreur.
Ce qui m’a totalement surpris, c’est l’humour dissipé un peu partout dans le film. Humour tout bonnement réussi d'ailleurs. À ce propos, j’ai l’intime conviction que l’humour est utilisé pour nous rassurer. A chaque fois que nous allons assister à quelque chose « d’horrifique », ou bien qu’un événement « horrifique » ait eu lieu, nous avons droit à quelques séquences comiques. Le personnage de Rod – le meilleur ami de Chris – apporte la dose d’humour qu’il faut.

Maintenant, revenons à la question du racisme : les noirs sont choisis pour leurs talents. Ici, Chris est choisi pour son talent de photographe. On peut donc se dire que justement, les noirs sont mis en valeurs … Mais non, il s’agit quand même de discrimination. Si ce sont des noirs qui sont sélectionnés, c’est tout simplement parce que le grand père de Rose a perdu contre Jesse Owens aux Jeux Olympiques de Berlin en 1936. C’est de là que vient sa haine des noirs. Néanmoins pour ceux qui « gagnent » les noirs au Bingo, je ne pense pas qu’il s’agisse de racisme. Quand on est raciste – et le cas échéant, si on n’aime pas les noirs – on ne peut supporter l’idée de vivre le reste de sa vie dans le corps d’un noir. Ceux qui « gagnent » ne sont pas raciste, du moins pas que. Personnellement, c’est comme ça que j’ai interprété la chose.

Bon par contre, l’aspect chirurgicale avec les greffes de cerveaux est un peu trop tiré par les cheveux. C’est uniquement pour cette raison que je n’ai pas mis de 5/5 à ce film. Honnêtement, c’est le seul point négatif (et encore, il est vraiment moindre) que j’ai pu trouver au métrage, qui est pour moi réussi en tout point – mis à part ce petit détail.

En bref, Get Out est une véritable perle qui donne à réfléchir. Nous sommes dans une période où l’on veut nous faire croire que le racisme n’est plus aussi présent qu’avant …  Mais ce n'est que de la poudre de Perlimpinpin ! L’hypnose représente ici les médias souhaitant nous faire penser que « tout va bien » alors que – justement – rien ne va. Nous sommes dans une fiction pas si loin du réelle. Un film qui fait redondance avec les dernières actualités, notamment la Présidence Trump et les polémiques sur les policiers racistes. Get Out met en avant ce que tout le monde pense tout bas et nous invite à arrêter de nous voiler la face.

Un film angoissant et oppressant mais tellement réel… Pour ma part, c’est une grosse gifle que je me suis prise. Ainsi, je le conseille à tous, y compris aux non-amateurs du genre. Get Out est tout simplement terrifiant et actuel, je ne pourrais pas mieux le qualifier.

Continuez de me lire et d’aller voir des films. Quant à moi je vous dis à très vite !

A bientôt sur Ciné-News ! (← en cliquant ici, vous retrouverez la page facebook dédiée à ce blog)
Alex

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