Translate

dimanche 31 mars 2019

Critique - Us [AVEC SPOILERS]




Note : 3,5/5

Ma dernière critique en date était celle des Crimes de Grindelwald et après avoir fait mon retour sur YouTube à travers une vidéo théories sur Avengers : Endgame (que vous pouvez retrouver >> ICI <<), il était grand temps que je revienne sur le blog ! Il se trouve que le deuxième long-métrage de Jordan Peele, Us (en salle depuis le 20 mars 2019), après l’excellent Get Out (que j’avais traité >> ICI <<), m’a suffisamment inspiré pour en faire un article. Vous êtes prêts ? Eh bien allons-y !

Le proverbe est bien connu, après un premier succès le plus difficile est de le confirmer avec le film suivant. Ce deuxième long-métrage était attendu au tournant. La première chose que je souhaite dire à propos de Us c’est qu’il ne s’agit pas d’un film d’horreur habituel avec des jump scare à tout va… Ce film est davantage angoissant qu’horrifique. Et l’angoisse de Us résulte bien sûr dans la situation malaisante – si je puis dire – dans laquelle les personnages principaux se retrouvent. On ne peut s’empêcher de nous imaginer à leur place, nous demandant comment nous réagirions et c’est de là que naît tout le malaise et toute l’angoisse que propose Us. Finalement, c’est un peu comme dans Get Out à ceci près qu’au travers de ce premier film, nous pouvions sursauter et avoir « vraiment » peur. Jordan Peele a souhaité ici traiter une toute autre forme de peur. Cela est totalement réussi – à mon sens – et je pense que le cinéaste est l’avenir du genre horrifique. Dans ma critique sur Get Out, j’avais précisé que le réalisateur jouait avec les codes du film d’horreur traditionnel en les réactualisant pour nous surprendre. Il en sera de même ici.

Cette critique comportera quelques spoilers, d’un point de vue analytique car l’intrigue repose sur plusieurs niveaux d’analyses qui me semble important à traiter. D’autre part, il paraît compliqué pour un film comme celui-ci de le critiquer sans ne rien dévoiler.  


Synopsis : De retour dans sa maison d’enfance, à Santa Cruz sur la côte Californienne, Adelaïde Wilson a décidé de passer des vacances de rêves avec son mari Gabe et leurs deux enfants : Zora et Jason. Un traumatisme aussi mystérieux qu’irrésolu refait surface suite à une série d’étranges coïncidences qui déclenchent la paranoïa de cette mère de famille de plus en plus persuadée qu’un terrible malheur va s’abattre sur ceux qu’elle aime. Après une journée tendue à la plage avec leurs amis les Tyler, les Wilson rentrent enfin à la maison où ils découvrent quatre personnes se tenant la main dans leur allée. Ils vont alors affronter le plus terrifiant et inattendu des adversaires : leurs propres doubles.



Get Out traitait du racisme, ici il sera plutôt question d’une satyre de l’American Dream à travers la famille blanche qui possède tout, vivant dans une superficialité évidente sans pour autant être réellement heureuse. Outre le concept du doppelganger, selon moi Us traite également en grande partie de la « peur » de l’Autre, de l’étranger, du fait que nous soyons notre propre ennemi – comme si les doubles représentaient une autre facette de notre personnalité. Us est aussi une critique sociale avec pour thème la lutte des classes. Très grossièrement, les humains lambdas qui vivent « en haut » seraient les riches tandis que les doubles, qui viennent donc « d’en bas » (cette hiérarchisation fait bien évidemment référence aux différentes classes sociales) seraient les pauvres. 
Une fois ce niveau d’analyse acquis, le fait que Red (c’est ainsi que nous nommerons les doubles puisqu’ils sont vêtus de rouge) ai prit la place de la véritable Adélaïde lorsqu’elles n’étaient qu’enfants peut donc faire écho à un changement de classe socialeRed est passé de la pauvreté à la richesse et inversement pour Adélaïde qui souhaite donc reprendre sa place en montrant au reste du monde qu’elle-même ainsi que les autres doubles existent et que nous devons en avoir conscience. Peut-être que je me trompe, mais le message véhiculé par Jordan Peele est celui de la lutte des classes sociales afin de faire évoluer les choses, de faire entendre la voix de la classe moyenne – d’une certaine manière. 

Libre à chacun d’interpréter ce qu’il voit à l’écran. Pour ma part, après avoir longuement réfléchi sur ce long-métrage voilà ce que j’en ai déduit. Je ne dis pas que mon interprétation est la seule qui puisse être valable mais je l’estime légitime. La complexité de Us, celle qui fait que nous ne sachions pas quoi penser juste après l’avoir vu est justement dû aux nombreuses thématiques imbriquées au sein de la thématique principale. En cela, je trouve ce thriller novateur dans la mesure où le réalisateur n’a pas tenté de faire un Get Out bis. Cependant, il vous faudra sûrement plusieurs heures voire plusieurs jours pour vous forger un avis concret sur ce film. De mon côté, lorsque je suis sorti de la salle de cinéma – bien qu’ayant apprécié le long-métrage – j’ai eu quelques difficultés à savoir quoi réellement en penser. 

Tout comme Get Out, ce thriller possède – bien que je ne sache pas s’il s’agit du terme adéquat – de nombreux présages de ce qui va se dérouler un peu plus tard. Plusieurs choses me viennent en tête : parlons déjà des lapins. Toute la séquence qui compose le générique est un plan où la caméra ne cesse de reculer pour que nous ayons une vue d’ensemble sur tous les lapins en cage. Mais pourquoi des lapins ? Si je ne dis pas de bêtise, les lapins sont les premiers animaux à avoir pu être cloné. Du coup, quand on apprend un peu plus tard dans le film que tous les humains ont été cloné par le gouvernement (en fait, on ne sait pas trop pourquoi ni comment mais là n’est pas le propos du film) on comprend alors l’utilisation des lapins lors du générique de début. L’autre élément qui me vient en tête est le t-shirt « Thriller » de Michael Jackson que la petite Adélaïde porte en début de film. De manière subtile, ce t-shirt annonce l’invasion des doubles façon zombies (puisqu’ils n’ont aucune conscience). On peut également noter le passage, si vous vous en rappelez, où la famille arrive sur la plage. Ils sont filmés de haut (en plongée il me semble), ce qui nous permet de voir leurs ombres. Là encore, les ombres annoncent l’arrivée des doubles. Dans le même genre, nous avons un plan – lorsque la famille d’Adélaïde est arrivée dans la maison de vacances – où la mère de famille est allongée sur le canapé. Elle observe la table basse où elle y aperçoit une araignée…. A côté d’une statue d’araignée. Pas besoin d’en dire plus, vous avez compris le fond de ma pensée. Les moindres détails sont importants, même ceux qui nous paraissent anodins. Tout comme ça pouvait l’être dans Get Out
On retrouve donc de nombreuses similitudes avec la précédente réalisation de Jordan Peele, faisant de cela sa marque de fabrique. D’emblée, on sent Jordan Peele impatient d’installer ses personnages et surtout d’installer une ambiance forte dans laquelle ils vont évoluer. Le cinéaste prend son temps pour poser son histoire, son contexte, ses motifs et enjeux horrifiques puis petit à petit et par paliers progressifs, Peele commence à élaborer sa mythologie horrifique avant de procéder comme sur Get Out, et de laisser son film vriller vers une épouvante proche du surréalisme.

J’ai dit un peu plus tôt que l’angoisse occupe une place prépondérante au sein de ce film. Cette angoisse ne se ressent pas uniquement par l’ambiance qui se dégage du long-métrage mais aussi pour la façon dont il est filmé. A de nombreuses reprises on constate que certaines scènes ou certains plans sont tournés de manière très originales, d’une façon vraiment pas anodine. Cette manière de tourner rend les choses encore plus malaisante et nous plonge d’autant plus dans l’angoisse. La musique aide grandement à y contribuer aussi. A titre d’exemple, la scène que j’ai mentionnée un peu plus haut (celle où ils arrivent sur la plage avec leurs ombres bien visibles derrière eux) est accompagnée d’une musique assez particulière. Dans un contexte tel que celui où ils viennent d’arriver en vacances, on se rend rapidement compte qu’il y a quelque chose de pas normal. Depuis le début donc, nous ne pouvons être à l’aise car nous comprenons qu’une chose mystérieuse se trame



Autre élément important : le cinéaste use de références à la pelle nous donnant même l’impression de nous retrouver dans un épisode de la Quatrième Dimension (pour ceux qui ont connu cette série), ce qui n’est aucunement un reproche. Côté thriller fantastique, nous sommes totalement servis avec une Lupita Nyong’o extraordinaire en figure de tension. Et puis il y a ce magnifique travail sur la photographie de Mike Gioulakis et la partition musicale de Michael Abels dont chaque note appuie remarquablement l’atmosphère glauque du film. Et tant que nous y sommes sur la musique, je tiens juste à dire que le « combat final » entre Red et Adélaïde est époustouflant et incroyable grâce aussi à la bande-originale (et à la chorégraphie génialissime). La soundtrack de Us est d’ailleurs la MEILLEURE soundtrack d’un film d’horreur que j’ai pu entendre ces dernières années. Vraiment, je vous invite à aller écouter la bande-originale qui est des plus mémorable. 

Néanmoins je dois tout de même reconnaître que Us n’est pas exempt de défauts. Ce que je peux lui reprocher en premier lieu c’est l’utilisation beaucoup trop excessive et dédramatisante de l’humour. Autant je trouvais les touches humoristiques de Get Out réussi (visant bien sûr à nous rassurer, ce que Jordan Peele tente de réitérer dans Us) autant ici, cela fait un peu too much. Le film aurait gagné à être davantage angoissant s’il n’y avait pas eu ce surplus d’humour. Dommage.
Enfin, l’autre défaut – et sans doute le plus important – résulte d’un problème d’écriture en ce qui concerne le troisième et dernier acte du film. Il s’agit d’un parti-pris évidemment, mais Peele entre beaucoup trop dans la « sur-explication » sans pour autant aller jusqu’au bout des choses – ce que peut être frustrant et qui peut en décevoir plus d’un.



Le casting est tout bonnement magnifique, comme j’ai pu le dire Lupita Nyong’o crève l’écran et Winston Duke (que j’ai découvert dans Black Panther) incarne ses personnages à la perfection. Us est un film angoissant – mais pas autant qu’il aurait dû l’être – et oppressant. Comme pour Get Out, c’est une grosse gifle que je me suis prise.

Ce n’est pas facile de se faire un nom à Hollywood et encore moins dès son premier long-métrage. Mais il aura suffi d’un Get Out à Jordan Peele pour que le public, comme la critique, retiennent le sien. Désormais, le voilà avec une réputation précoce à défendre, obligé de montrer qu’il ne s’agissait pas de la fameuse chance du débutant. Assiste-t-on à la naissance d’un nouveau maître d’horreur ? J’ai essayé de vous donner la réponse à travers cette critique ! En termes de préférence j’opterai pour Get Out. Toutefois, Us est un thriller que je conseille à tous, y compris aux non-amateurs du genre.

À bientôt sur Ciné-News ! ( en cliquant ici, vous retrouverez la page facebook dédiée au blog)


Alex